#TrésorDeBU n°2 – Un caractère persistant

C’est non pas un mais deux trésors qui se livrent actuellement à vous au 2ème étage de la bibliothèque Lettres et Sciences humaines !

Un caractère persistant

La « lettre françoise d’art de main » ou « lettre façon descriture », typographie plus communément appelée « caractère de civilité », reproduit la lettre cursive gothique manuscrite. L’emploi de ce caractère qui imite l’écriture française des hommes de lettres du milieu du XVIe siècle a connu rupture et discontinuité au cours de trois siècles d’histoire de l’imprimerie. Les deux ouvrages présentés illustrent les deux moments clés de son utilisation.

Les origines

À Lyon, en 1557, Robert Granjon, un des plus grands graveurs et fondeurs de caractères français du XVIe siècle, fait paraître le premier livre imprimé avec les caractères de civilité qu’il a dessinés et gravés. Il s’agit de la traduction française Dialogue de la vie et de la mort d’Innocent Ringhieri dont est exposé l’exemplaire de l’Université Bordeaux Montaigne. De l’aveu même de son créateur, ce caractère est destiné à concurrencer le romain et l’italique par une lettre qui se veut française.

Cependant, malgré une diffusion d’environ 300 éditions sur cent ans et qui s’étend à toute l’Europe humaniste, le caractère n’a pas le succès national espéré. Cantonné à certains types d’ouvrages, il se fait de plus en plus rare, pour disparaitre complètement au cours du 17e siècle…

Le renouveau

Ces caractères spéciaux pourtant réapparaissent dans les presses françaises en 1703 grâce au succès de la publication par Saint Jean-Baptiste de la Salle des Règles de la bienséance et de la civilité chrétienne. Dès lors la plupart des manuels de savoir-vivre utilisés dans les écoles sont imprimés en caractères cursifs. C’est le cas du second livre exposé : La civilité puérile et honnête, pour l’instruction des enfans de Mathurin Cordier. Outre l’instruction des règles de savoir-vivre, ces manuels de pédagogie à destination des écoliers servaient à l’enseignement de la lecture ainsi qu’à l’apprentissage de l’écriture. Leur production augmente tout au long du XVIIIe et culmine au début du XIXe siècle où le caractère prend conformément à son usage le nom de civilité.

Aujourd’hui demeurent quelques polices numériques inspirées de cette typographie originale tombée en désuétude. Il n’en reste pas moins que, comme l’indique Rémi Mathis :

l’exemple d’une typographie venant tout droit d’une tradition gothique, traversant pourtant la Renaissance et revenant en grâce au beau milieu du XVIIIe siècle est sans équivalent.

Pour en savoir davantage sur les caractères de civilité

Entretien : Rémi Jimenes (Centre d’étude de la Renaissance, Tours), Catherine Volpilhac-Auger (ENS de Lyon et IUF) – durée 25:22

A bientôt pour un prochain #TrésorDeBU !

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